La Confusion des Sentiments

De Stefan Zweig

À l'occasion d'un hommage qui lui est rendu, un vieil universitaire se remémore la rencontre qui a décidé de sa vie... Passion d'un jeune homme pour son Maître; passion de ce Maître pour une littérature ressentie par le coeur avant que d'être comprise par l'esprit; passion d'une jeune femme pour son mari.

Sentiments confus, confondus qui unissent ces trois personnages... Les mots de Rilke font écho à ceux de Zweig tandis que résonne la langue de Shakespeare.

La confusion des sentiments nous raconte l’histoire d'un vieux professeur. Ses élèves et collègues de la faculté ont rédigé tout à son intention une biographie. Deux cents pages d'articles, de détails minutieux sur sa vie, sa carrière, sa passion pour les lettres... Cet homme ressent alors le besoin de revenir point par point sur sa propre histoire. Parce qu'ils ont oublié le point essentiel : l'évènement qui a marqué sa vie, qui l'a poussé à étudier avec ferveur, et qui l'a mené à une telle vénération de la littérature.

Il se penche sur son passé : il revoit le moment précis de son existence où renonçant à sa vie frivole, il plonge éperdument dans le monde de l'esprit. Un professeur et sa femme assistent complices, à la naissance de cette "ardente curiosité" qui a tous les caractères de la passion charnelle.

Ils la partageront avec lui jusqu'à brûler eux-mêmes dans l'enfer de la passion...

Théâtre d'Air afiche La Confusion des Sentiments
Création 2005

Texte
Stefan Zweig

Adaptation
Virginie Fouchault et Jack Percher

Mise en scène
Virginie Fouchault

Assistant
Karim Fatihi

Avec

Patrick Coulais Roland âgé
Cédric Zimmerlin Roland jeune
Nigel Hollidge le professeur
Emmanuelle Trégnier Anna

Scénographie et lumière
Jack Percher

Costumes
Patrice Monnerie

Régie
Jérôme Dufour

 

Photos

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Intentions de mise en scène

Les quatre personnages sont en permanence sur le plateau. La présence d'un personnage est parfois atténuée, parfois dissimulée, mais ne disparaît jamais du plateau. Si un personnage ne participe pas à une discussion il peut l'observer de loin, l'écouter secrètement, voire l'ignorer, mais rien ne lui est caché.
La Confusion des Sentiments, c'est la relation d'un trio, de trois tensions : Roland / le professeur, le professeur / Anna, Roland / Anna. C'est pourquoi Jack Percher a conçu la scénographie à partir du triangle. Nous ne sommes pas dans un espace unique, défini et réaliste. Toutefois la scénographie permet de circuler dans différents espaces : espaces intérieurs, espaces intimes, espaces extérieurs, espaces publics, espaces privés.

L'adaptation

C'est le souvenir qui permettra d'aller puiser l'essentiel dans la nouvelle, dans un ordre commandé par la théâtralité et non par le récit. Roland se prépare, chez lui, physiquement et intelectuellement à répondre à l'admiration qu'il reçoit de ses élèves et collègues. Il prépare un discours... Ce discours est interrompu par l'envahissement du souvenir. Pour la première fois de sa vie, il y cède et convoque tous les personnages présents dans ce souvenir, y compris lui-même à vingt ans.

Les personnages

Roland à 50 ans : Il est le Roland de la distance. Celui qui comprend et analyse. Il se trouve encore parfois très ému mais ne lutte plus contre le sentiment.
Roland à 20 ans : Le jeune Roland est lui physiquement et moralement bouleversé, perdu et tourmenté. Il est celui qui ne comprend pas mais, qui guidé par son inconscient, agit, répond, influe sur le sens de la relation. Il est l'homme de la confusion.
Le professeur : Cet homme est physiquement presque banal et transparent. Pourtant il est celui qui brille, fascine et passionne lorsqu'il parle de Shakespeare, lorsqu'il dit ses sonnets, lorsqu'il joue des extraits de ses pièces. Dans le trio il est celui qui tait le sentiment "jusqu'à se mordre les lèvres". Il est celui qui dans sa lutte est imprévisible, contradictoire et parfois blessant.
Anna : Elle est la "femme de ..." Elle est l'esquisse, le clair obscur; pourtant elle est l'indispensable. La passion entre les deux hommes est possible parce qu'Anna est présente. Elle est celle qui anticipe, qui prévient, qui protège et qui accepte parce qu'elle aime, sans être ni une victime, ni soumise. Elle est celle qui amène la vie, la gaieté et la spontanéité.
 

Présentation de l'auteur

Stefan Zweig est né le 28 novembre 1881 à Vienne, dans une famille d'industriels appartenant à la grande bourgeoisie israélite.
En 1919, il s'installe à Salzbourg où il restera quinze ans. C'est là qu'il écrit quelques unes des nouvelles qui lui apportent une célébrité mondiale : Amok (1922), La Confusion des Sentiments (1926), Vingt-quatre heures de la vie d'une femme (1934).
Avec la nouvelle, Zweig trouve sa veine la plus originale et s'affirme bientôt comme le peintre minutieux et magistral des drames de l'être intime. Le destin joue un grand rôle dans ses récits, mais le destin pour Zweig n'est pas une entité surnaturelle. À la lumière des enseignements de Freud (auquel il consacra un essai en 1931), Zweig s'applique à révéler, dans le principe de fatalité dont ses héros et héroïnes sont victimes, la part qui revient au déterminisme de l'inconscient.
Parallèlement, il fait oeuvre de biographe et d'essayiste. Il écrit son unique roman La pitié dangereuse en 1939.
Profondément affecté par la guerre qui sévit en Europe il décide de s'installer au Brésil en 1941. Désespérés de l'avenir du monde, Zweig et sa jeune femme décident de se donner la mort. Ils s'empoisonnent ensemble le 23 février 1942.

 

Production

Avec le soutien de la région Pays de la Loire, du Conseil Général de la Mayenne et de la ville de Laval.
Aide à la diffusion DRAC des Pays de la Loire.

 

Revue de presse

La Terrasse

Entretien : Virginie Fouchault

La Confusion des sentiments : l’ambivalence de l’âme humaine.

« Tout y est vrai, il n'y a que l'essentiel qui y fasse défaut. » : c’est ainsi que Roland, vieil universitaire, regarde la biographie rédigée par ses élèves. L’essentiel fut sa rencontre, alors qu’il était étudiant, avec un professeur qu’il admira sans mesure. Stefan Zweig plonge au cœur de cette relation trouble et passionnelle, où se révèle l’ambivalence de l’âme humaine.

Pourquoi avoir choisi ce texte ?

Virginie Fouchault : Zweig parvient à saisir la complexité de l’humain avec une sensibilité et une justesse stupéfiantes, comme s’il connaissait les moindres replis de l’âme, comme s’il parvenait à se glisser dans l’intériorité de ses personnages. Cette écriture, très organique, suit l’élan des sentiments et des émotions qui submergent les êtres. Elle touche des endroits très intimes, très enfouis. Dans La Confusion des sentiments, je me suis reconnue, comme beaucoup d’autres, dans la figure du jeune homme, fasciné par le professeur et pris dans une relation trouble où se mêlent la soif de savoir, l’amour et le transfert.

Comment avez-vous réalisé l’adaptation de ce récit écrit à la première personne ?

V.F. : Pour donner au texte une théâtralité, nous avons dédoublé le personnage du narrateur, incarné par deux comédiens. Le vieil universitaire convoque ainsi les figures du passé : lui-même, quand il était jeune élève, le professeur et sa femme. Il s’adresse à eux et revit la situation avec la distance creusée par le temps et la maturité. Les quatre acteurs restent toujours présents sur le plateau, architecturé par une scénographie qui permet de circuler entre les espaces, intérieurs ou extérieurs. Les héros de Zweig sont envahis et dépassés par ce qu’ils ressentent, et ne peuvent penser leurs émotions qu’après coup. Ce qui renvoie d’ailleurs au piège qui guette le comédien lorsqu’il se laisse déborder par les sentiments. Pour trouver la justesse, il doit garder ses distances avec le rôle. Les années comme la représentation introduisent la distance nécessaire pour se ressaisir du vécu.

« Cette écriture, très organique, suit l’élan des sentiments et des émotions qui submergent les êtres. »

Pourquoi insérer un extrait des Lettres à un jeune poète, de Rilke, qui défend la nécessaire liberté de l’artiste face à la critique ?

V.F. : Pour soulever certaines interrogations quant au fonctionnement actuel du dispositif culturel. De plus en plus, l’institution, de par les règles qu’elle fixe aux compagnies pour l’attribution des subventions, règle le tempo de la création. Or chaque artiste a son rythme d’inspiration et de travail. D’autre part, il me semble important de renouer le lien entre le goût du public, l’institution et l’artistique.

Propos recueillis par Gwénola David

La Confusion des sentiments, d’après Stefan Zweig ; mise en scène de Virginie Fouchault. Du 6 au 27 juillet à 19h55, au Grenier à Sel.